Nous n'avons pas pu dans cet article rappeler la définition "formelle"
d'une formalisation. Des exemples introductifs de formalisation peuvent
être trouvés dans [Hofstadter79] (notamment aux chapitres 1,
2, 3, 7 et 8) ainsi que dans [Nilsson80] (aux chapitres 1 et 4). Un ouvrage
de référence, non mathématique, sur l'approche F+I
en science, d'une richesse et d'une profondeur sans pareille est certainement
[Piaget67a]. On y trouve notamment une très belle introduction à
la formalisation dans le chapitre de Grize [Grize67]. Un ouvrage de référence,
cette fois-ci mathématique, complet et rigoureux, est sans aucun
doute [Kleene67] où on trouve en particulier, une intéressante
présentation de la théorie du modèle et de la théorie
de la démonstration qui clarifie la notion d'interprétation.
Une présentation synthétique et claire des systèmes
formels du point de vue langage est faite dans [Vauquois76].
Nous n'avons pas pu non plus traiter ici le très vaste et très
important sujet des difficultés mathématiques rencontrées
par la formalisation et les nombreux théorèmes de limitation
qui les explicitent. Une introduction amusante sur ce sujet peut être
trouvée dans [Hofstadter79]. Dans [Piaget67a], l'article de Ladrière
[Ladrière67] en fait une bonne analyse. Les démonstrations
de la plupart de ces théorèmes peuvent être trouvées
dans [Kleene67]. Enfin, une discussion des conséquences philosophiques
et surtout cognitives de ces théorèmes peut être trouvée
dans [Lucas61].
Les difficultés de l'intelligence artificielle et de la robotique
avec la notion d'interprétation ont fait couler beaucoup d'encre.
Une analyse de la logique en tant que langage est présenté
dans les deux articles de Léo Apostel [Apostel67a] & [Apostel67b]
toujours dans [Piaget67a]. On pourra se référer notamment
à [Harnad89] et [Harnad90] concernant le "symbol grounding problem".
Diverses critiques de l'intelligence artificielle sont fondées sur
des arguments similaires à ceux proposés ici, par exemple,
celles de Dreyfus [Dreyfuse79], de [Searle81], de Reeke et Edelman [Reeke88],
de Malcom et Smithers [Malcom89], de Winograd et Flores [Winograd86], ou,
enfin, dans l'ouvrage très complet de Bickhard et Terveen [Bickhard95].
Pour tenter de surmonter les difficultés que les approches "classiques"
(F+I) rencontrent en robotique, Brooks a proposé l'approche réactive
(voir [Brooks86a], [Brooks86b], [Brooks89] et [Brooks90]) qui a été
à l'origine de nombreux travaux. L'apprentissage et la modélisation,
qui au début n'en étaient pas les préoccupations majeures,
ont été abordées depuis sous diverses formes (voir,
entre autres, [Mataric91], [Koza91], [Brooks91a] et [Horswill93]).
Cette critique de l'approche F+I mériterait d'être précisément
située, dans le cadre de l'immense réflexion épistémologique
déjà citée, sur la triade "réalité
- observateur - représentation" et son pendant "référé
- signifié - signifiant". Il est évident qu'il n'est
pas possible dans le cadre de cet article de donner ne serait ce qu'un aperçu
de la bibliographie sur le sujet. Contentons-nous de donner un point de
départ intéressant avec le livre de Michel Foucault intitulé
"Les mots et les choses" [Foucault66] qui a le mérite
de présenter toute l'évolution historique des concepts de
signe et de langage, et avec le livre de Joëlle Proust "Question
de forme" [Proust86] plus centré sur les temps modernes
et beaucoup plus "technique".
Au coeur du débat actuel sur le sujet se trouve, d'après nous,
la notion d'objectivité dans sa double acception : (1) possibilité
de juger de la validité d'une théorie indépendamment
de toute connaissance sur celui qui l'a formulé, en faisant complètement
abstraction de l'observateur et, par conséquent, (2) possibilité
qu'à un niveau de description donné on puisse confondre la
réalité avec la connaissance qu'on en a.
Admettre qu'il puisse exister des modèles indépendants de
tout observateur, c'est supposer que le problème de la catégorisation
puisse être parfaitement résolu et que l'environnement puisse
être muni d'une structure ensembliste indépendamment de toutes
considérations sensori-motrices. Toute cette première partie
n'a pas eu d'autres buts que de contester cette possibilité.
Le passionnant livre de Roland Omnès [Omnès94] est pratiquement
totalement consacré à l'analyse de l'approche formalisatrice
en physique et notamment aux difficultés rencontrées. On trouvera
aussi de très intéressantes considérations sur ce sujet
dans [Poincaré02] même si, évidemment, les progrès
de la physique du XXème siècle ne sont pas pris en compte.
Ce sujet est aussi amplement abordé dans [Piaget67a] notamment dans
les articles d'André Lichnerowicz [Lichnerowicz67], Jean Piaget [Piaget67b],
[Piaget67c] & [Piaget67d], Jean Ullmo [Ullmo67] et Louis de Broglie
[Broglie67]. Le livre d'Ivar Ekeland [Eckeland84] fait un tour d'horizon
passionnant et abordable des difficultés et critiques de l'objectivisme
(et du déterminisme) et est agréablement complété
par son livre de 91 [Eckeland91]. Une introduction intéressante aux
sciences cognitives, revenant sur le rôle épistémologique
de l'objectivisme, est donné dans [Stewart92].
Enfin, une présentation beaucoup plus détaillée de
toute cette problématique peut être trouvée dans [Dedieu95a]
(notamment dans le chapitre 2).